Männin un film de Mika’ela Fisher

La femme ne serait-elle qu’une part de l’homme, ainsi s’interroge Mika’ela Fisher dans son court-métrage ?

La femme ne serait-elle qu’une part de l’homme, ainsi s’interroge Mika’ela Fisher dans son court-métrage ? Artiste protéiforme, capable de constituer avec ses mains des robes de haute couture, faites avec les plus belles étoffes, Mika’ela Fisher est aussi réalisatrice, mannequin et productrice. Son film, Männin, est une variation autour de la faute originelle, composée dans un univers flou et paradisiaque où les corps se mélangent tout autour d’un arbre à la musculature généreuse. D’abord séductrice avec son rouge à lèvres, cette femme qui ne serait finalement qu’un morceau de cette côte d’Adam devient tour à tour provocante et douée d’une sagesse réflexive. Le mélange des langues, le film passant de l’allemand au français, fait converger l’ensemble vers une allégorie universelle autour de la place de la femme dans la société occidentale. 

En effet, la côte d’Adam n’est pas la matière originelle, nous dit l’artiste, mais bien la confusion des genres où l’homme et la femme se confondent, différenciés dans leur apparence pour mieux s’associer dans leur quête d’une vie heureuse. Mika’ela Fisher compose les deux rôles, jouant sur ce lien de gémellité pour donner à l’homme un visage aux traits souvent féminins. Dès lors, la tentation de dévorer le fruit défendu se fixe dans une réciprocité de fait, dans une tentation commune d’abandonner ce paradis, espace où la désobéissance aux commandements devient un moyen de survie à une forme d’oppression manichéenne.   

Männin film

Männin s’impose aussi dans ses paradoxes.Filmées en plan rapproché, les images se déclinent dans un horizon visuel flouté, comme si le monde était bouché dans ses aspirations au changement, comme si le monde déclinait sans cesse les mêmes récits pour instituer un rapport de domination sur la femme. Même la musculature de l’arbre autour duquel les personnages gravitent, renvoie à la symbolique de la virilité, au noeud psychologique et névrotique de la culture judéo-chrétienne. Même si la conclusion est offerte à Ève, on sent peu d’espoir dans cette unicité des âmes, comme si elles étaient vouées à la dissemblance. 

Réflexion sur la condition féminine, Männin surprend tout autant par la musique qui fait corps avec l’image, s’incarne sous l’archet magistral de Birgit Yew. Les variations imposent une certaine mélancolie qui tranche avec le film aux couleurs volontairement exagérées, à la blancheur lactescente, pour permettre au hors-champ de fixer l’image de la réunion harmonieuse des corps dans la conscience du spectateur.  

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑